Bénin, Société et Environnement - Barrage d'Opkara menacé
 

Page d'accueil
Eau
=> Hydrographie
=> Gestion Intégrée des Ressources en Eau
=> Barrage d'Opkara menacé
=> Pladoyer national pour la ratification de convention
Faune
Flore
Population
Relief et Climat
Société
Tourisme
Contact
Sondages

NOTE DE PLAIDOYER POUR LA REHABILITATION ET LA MISE EN PLACE D’UNE GESTION CONCERTEE DU BARRAGE DE L’OKPARA, UNIQUE SOURCE D’AEP DE LA VILLE DE PARAKOU

SE/PNE-Bénin, décembre 2008

Introduction

Au Bénin, l’Etat a adopté la Gestion Intégrée des Ressources en Eau (GIRE) comme approche prioritaire de gestion des ressources en eau du pays. Le processus d’opérationnalisation de la GIRE est en marche, avec notamment l’Initiative Néerlandaise d’Appui à l’élaboration du Plan d’Action National de GIRE (2005-2007), la politique nationale de l’eau et la nouvelle loi portant gestion de l’eau respectivement en cours d’adoption au niveau du gouvernement et à l’étude à l’Assemblée Nationale.

Malgré cette volonté manifeste, la gestion des retenues et cours d’eau est confrontée à  d’énormes problèmes communs à la quasi-totalité des eaux de surface du Bénin (envahissement par les plantes aquatiques indésirables, comblement des retenues d’eau, pollution par les intrants chimiques et les déchets solides…). Les causes sont à la fois d’origines naturelle et anthropique. Dans la plupart des cas, ces problèmes sont amplifiés par l’absence d’un cadre de gestion adéquat de la ressource.

Cette problématique de gestion durable des retenues et cours d’eau est particulièrement préoccupante dans les zones de socle où l’Approvisionnement en Eau Potable (AEP) est quasiment impossible à partir des sources d’eau souterraines. Dans ces conditions, on a alors recours aux eaux de surface pour l’AEP des centres urbains. Mais ces eaux de surface qui représentent la véritable alternative sont souvent exposées aux problèmes sus-cités et à l’impact du changement et de la variabilité climatiques. La rivière Okpara, grand affluent du fleuve Ouémé en est un cas représentatif.

1.      Genèse du plaidoyer sur la situation du barrage de l’Okpara

Dans le cadre de ses actions de promotion de la GIRE, le Partenariat National de l’Eau du Bénin (PNE-Bénin) s’est intéressé au mode de gestion du barrage de l’Okpara. Actuellement, ce barrage se trouve dans un état de dégradation critique qui menace sa fonction d’AEP. Et pourtant, il est l’unique source d’AEP pour la ville de Parakou.

Conscient de l’importance de ce barrage et des conséquences graves qui découleraient de l’impossibilité de fournir l’eau courante à plus de 130 000 habitants à Parakou, le PNE-Bénin mène depuis janvier 2008 des actions de plaidoyer à l’endroit des acteurs du secteur de l’eau. L’enjeu national qu’il y a à sauvegarder ce barrage a été perçu par ces acteurs qui ont initié, avec le soutien du Ministre en charge de l’eau des actions pour la réhabilitation du barrage et une gestion concertée et durable du bassin de l’Okpara. Il s’agit, entre autres, de l’organisation par la DGEau, la SONEB et le PNE-Bénin, du 11 au 13 décembre 2008 à Parakou d’un séminaire sur la «problématique de la gestion durable du barrage de l’Okpara : enjeux, défis majeurs et approches de solution pour l’alimentation en eau potable de la ville de Parakou».

A cet égard, une étude technique et socioéconomique sommaire intitulé « conditions de gestion du barrage de l’Okpara et impacts à moyen et long termes » a été réalisée afin de mettre à la disposition des acteurs de l’eau les éléments d’information nécessaires pour mieux appréhender la situation du barrage et en déterminer les mesures idoines qui s’imposent.

2.      Présentation du barrage      

Le barrage de l’Okpara a été implanté par la SODAK (Société Dahoméenne du Kénafe) en 1969 sur le cours d’eau Okpara dans l’arrondissement de Kika (Commune de Tchaourou), entre le village Kpassa à l’Ouest et Kika 2 à l’Est. En 1972, l’ex-SBEE a hérité du barrage et a démarré les activités de pompage et d’AEP de Parakou en 1975 après avoir effectué des travaux de réhabilitation et d’aménagement.

Le bassin versant de l’Opkara  recouvre les communes suivantes : N’Dali, Pèrèrè, Parakou, Bembèrèkè, Nikki et Tchaourou. Le cours d’eau Okpara est alimenté en aval par les cours d’eau Dama, Borokou et en amont par Tounsi, Bouinkan, Saabi.

3.      Utilité du barrage de l’Okpara

La ville de Parakou dépend entièrement de ce barrage pour ses besoins en eau potable. L’eau pompée dans la retenue est traitée à l’usine de traitement d’eau se trouvant dans la commune de Parakou.

La retenue d’eau constitue également une source d’eau importante pour les populations riveraines du barrage. Les activités pratiquées par les populations sont essentiellement la pêche, le pastoralisme, l’agriculture et le maraîchage aux abords ou dans le lit du cours d’eau, le puisage d’eau pour les besoins domestiques y compris la boisson, et l’accomplissement des rites traditionnels.

Le cours d’eau de l’Okpara en tant que bras important du fleuve Ouémé contribue non seulement à alimenter ce fleuve mais de manière plus générale à la régulation naturelle et à la vie du fleuve Ouémé. Toute perturbation au niveau de l’okpara pourrait engendrer des conséquences dommageables au niveau de l’Ouémé en aval. Les espoirs de résolution des problèmes d’AEP de la région des Collines reposent d’ailleurs sur les eaux de ce fleuve. Les divers projets en préparation ou en cours de réalisation en témoignent.

4.      Menaces sur l’Okpara et préoccupations des acteurs de l’eau

 Aujourd’hui, diverses inquiétudes existent quant à la capacité réelle du barrage à fournir l’eau pour l’AEP de la métropole du nord-Bénin, notamment à cause des problèmes liés à la dégradation des  ouvrages d’art du barrage, ainsi qu’à l’absence d’une gestion concertée du barrage. Les résultats de l’étude technique et socioéconomique font état de l’existence de graves menaces pour la préservation du barrage et par ricochet, la sécurisation de l’approvisionnement en eau potable des populations de Parakou. Les points suivants constituent les principales menaces :

a.      La dégradation des ouvrages du barrage est à un niveau avancé : l’évacuateur latéral est complètement érodé et raviné tandis que la digue qui sert de passage vers le Nigéria est affaissé par endroits et montre des fissures et des signes inquiétants d’érosion et de rupture ; si rien n’est fait, l’évacuateur pourrait être détruit dès les prochaines pluies et la rupture de la digue va s’accélérer ;

  1.  L’envahissement sur plus de 90% de la surface de la retenue d’eau par les plantes aquatiques indésirables qui non seulement encombrent la retenue, réduisent la quantité d’eau et d’oxygène disponibles (absorption et évaporation) mais handicapent aussi de façon sérieuse le pompage de l’eau dans la retenue et limite d’autres activités telles que la pêche ;
  2. L’ensablement continu du cours d’eau dû notamment au déboisement et aux mauvaises pratiques culturales agricoles, d’élevage et de pêche dans le bassin contribue de façon importante au comblement de la retenue  ; selon les données de la SONEB, la capacité initiale de 5.750.000 m3 aurait connu une perte moyenne en volume d’environs 2 millions de m3 ;
  3. La pollution des eaux par les déchets solides ménagers (défécation, ordures, cadavres d’animaux, corps polluant issus des rites traditionnels), les minéraux s’échappant du sol (fer, manganèse) ainsi que par les pesticides et engrais cotonniers, complique et rend coûteux le traitement de l’eau par la SONEB ;
  4. Les conflits fonciers et les conflits agriculteurs-éleveurs liés à l’eau.

Le diagnostic de la situation du barrage révèle en outre :

-         l’inexistence de tout cadre de gestion concertée impliquant au minimum le gestionnaire (Administration de l’eau), l’exploitant (SONEB), la commune  et les autres groupes d’usagers de cette ressource autour du barrage ;

-         l’absence de périmètre de protection du barrage tel que recommandé pour de pareils ouvrages ;

-         l’absence d’un système de suivi adéquat de la ressource ; ce qui ne permet pas de savoir comment la ressource évolue et rend extrêmement compliquée la planification des usages et/ou la conduite d’étude sur le comportement hydrologique de la ressource ;

-         l’insuffisance des actions engagées par la SONEB (enlèvement des plantes aquatiques en 1999 et 2006, aménagement du déversoir latéral en 2005) ;

-         l’insuffisance de forages dans les villages riverains de la station de pompage, entraînant le recours à l’eau de la retenue ;

-         la prévalence des maladies liées à l’eau dans les villages riverains.

5.      Nécessité d’actions urgentes

L’analyse des données hydrologiques et climatiques confirme que les apports d’eau arrivant dans la retenue sont encore suffisants par rapport aux prévisions de départ et par rapport à l’évolution démographique de Parakou d’ici 2025. Cependant, la capacité intrinsèque du barrage à stocker l’eau et à fournir de l’eau pour les besoins d’eau potable des populations de Parakou est remise en cause pour les raisons suivantes :

-         l’AEP évolue à un rythme qui dépasse les prévisions ; la quantité d’eau prélevée à fin 2007 correspond au niveau de pompage attendu en 2012, soit 3.423.692 m3 ;

-         le niveau de prélèvement de 3.423.692 m3 à fin 2007 est à la limite du volume utile de stockage pour les pratiques d’exploitation recommandées en considérant une année de pluviométrie maximale, soit 3,93 millions de m3 ;

-         dans les conditions actuelles d’exploitation du barrage, la quantité estimée d’eau pompée à fin 2008 (3.873.304 m3) avoisinerait le volume d’eau disponible, soit 3,93 millions de m3 ; mais d’ici fin 2009, la quantité d’eau disponible pourrait ne plus suffir pour répondre aux besoins de la ville de Parakou.

Tout cela est essentiellement lié à l’augmentation continue du volume mort de la retenue (ensablement et envahissement par les plantes aquatiques). D’après les témoignages des pêcheurs recueillis sur place, on peut traverser à pieds, à une certaine période de l’année, une partie du plan d’eau.

Toutes ces informations dénotent de l’urgence d’une mobilisation de tous les acteurs concernés pour la mise en œuvre d’actions concertées afin de garantir de façon durable, la fourniture d’eau par le barrage et la préservation de l’écosystème du cours d’eau de l’Okpara. Les actions de sensibilisation et de plaidoyer initiées par le PNE-Bénin à l’endroit des acteurs locaux et nationaux, le séminaire sur l’Okpara initié par les acteurs de l’eau vont dans ce sens et méritent d’être relayées au plus haut niveau afin de relever les défis suivants :

 

Dans l’immédiat (avant la prochaine saison des pluies) :

-         réfectionner l’évacuateur latéral ;

-         réfectionner la digue, au moins au niveau de la partie reliée à l’évaluateur latéral ;

-         créer un périmètre de protection de la retenue à reboiser pour la sécuriser ;

-         sensibiliser les riverains du barrage et du cours sur les bonnes pratiques d’utilisation et de protection de ces ressources ;

A court terme (dans les douze mois à venir) :

-         mettre en place un cadre de concertation des acteurs en vue d’une gestion durable des ressources en eau du barrage et de son bassin versant ;

-         mettre en route une étude de faisabilité pour l’augmentation de la capacité de la retenue ou la construction d’un nouveau barrage ;

-         organiser du suivi des ressources en eau du barrage et du cours d’eau ;

-         remettre en capacité la retenue d’eau ;

A moyen terme (dans les trois ans à venir) :

-         institutionnaliser l’intégration de la GIRE dans les outils de développement local à l’instar des Plans de Développement Communaux (PDC), des Schémas de Développement et de l’Aménagement Communal (SDAC) ainsi que des instruments inter communaux de gestion durable des ressources de bassin versant tel les Schémas d’Aménagement et de Gestion de l’Eau (SAGE) ;

-         élaborer et mettre en place un plan de gestion durable du barrage et du bassin versant de l’Okpara ;

-         réaliser les travaux d’augmentation de la capacité de la retenue et/ou de construction d’un second barrage.

Conclusion

La problématique de gestion et d’exploitation durables du barrage et du cours d’eau de l’Okpara recouvre des enjeux nationaux auxquels il faut faire face immédiatement. Car, faudrait-il le rappeler, il n’existe à ce jour aucune alternative à l’AEP de la ville de Parakou si l’on devait arrêter ce barrage pour cause de travaux d’aménagement ou s’il venait à ne plus satisfaire la demande de Parakou en eau. En ce sens, cela doit être traité comme une priorité pour la recherche et la mise en œuvre de solutions idoines.

La situation de l’Okpara nous offre l’opportunité d’initier une action à conduire à titre pilote dans l’espoir de la dupliquer sur l’ensemble des retenues d’eau du pays qui connaissent de pareils maux. Elle sert aussi d’opportunité pour tester certains dispositifs/cadres de gestion de la ressource proposés dans la loi sur l’eau en attente d’étude à l’Assemblée Nationale, tels que les conventions locales qui doivent servir à définir, à une échelle donnée, l’ensemble des règles de gestion et d’exploitation durables de la ressource eau.

Toute considération mise à part, il urge de réhabiliter le barrage de l’Okpara pour éviter de se retrouver dans l’incapacité de fournir de l’eau potable dans la grande ville de Parakou.

Aujourd'hui sont déjà 4 visiteurs (5 hits) Ici!
 
Ce site web a été créé gratuitement avec Ma-page.fr. Tu veux aussi ton propre site web ?
S'inscrire gratuitement